Impuissance pédagogique

(Attention : sujet plombant)

Ressentez-vous parfois un sentiment d'impuissance envers certains de vos élèves ? Ceux qui rejettent systématiquement les exercices écrits ? Et ceux (souvent les mêmes) qui n'accordent aucune attention à ce que vous "dites" : explications, lectures, consignes, méthode...
C'est douloureux, non ?

Je me demande si là n'est pas la plus grande cause de l'échec scolaire (et aussi de la souffrance enseignante) : ne pas savoir rattacher ces élèves aux wagons (alors qu'apparemment, ils ont l'intelligence nécessaire aux apprentissage scolaires) : ceux qui ne sont pas concernés, ou très ponctuellement, par ce qui se passe dans la classe d'un point de vue "intellectuel", ceux qui évitent coûte que coûte, par différents moyens, l'effort.
Qui n'y voient sans doute aucun intérêt. Ceux qui, aussi, pensent avoir compris (ou qui ont réellement compris) du premier coup, et qui ne voient pas comme nécessaire la systématisation, et qui donc, en définitive, restent sur des bases d'une fragilité énorme... et qui en définitive, n'apprennent rien.

Que faire face à ces échecs ?

Oh que oui! Je connais bien ce sentiment d'impuissance. En fait, Mufab, très souvent l'énergie que tu as déployée pour raccrocher ces élèves n'est pas inutile... On n'en voit pas les bénéfices tout de suite - c'est parfois en cm1, Cm2 qu'ils apparaissent.
Et puis le panel est large: les paresseux, les "qui sont dans leur monde", les pas mûrs, trop jeunes qui ne voient pas à quoi ça sert, les envahis par d'autres soucis, les qui subissent l'immaturité des parents (qui mettent leurs enfants à l'école qd ça leur chante ou qui font l'autruche), les en grande souffrance et bien d'autres encore...
Nous faisons au mieux. Le soutien du Rased est important. Il faut les impliquer coûte que coûte. C'est usant, éprouvant pour les élèves comme pour nous.

Arc a écrit:Oh que oui! Je connais bien ce sentiment d'impuissance. En fait, Mufab, très souvent l'énergie que tu as déployée pour raccrocher ces élèves n'est pas inutile... On n'en voit pas les bénéfices tout de suite - c'est parfois en cm1, Cm2 qu'ils apparaissent.
Et puis le panel est large:  les paresseux, les "qui sont dans leur monde", les pas mûrs, trop jeunes qui ne voient pas à quoi ça sert, les envahis par d'autres soucis, les qui subissent l'immaturité des parents (qui mettent leurs enfants à l'école qd ça leur chante ou qui font l'autruche), les en grande souffrance et bien d'autres encore...
Nous faisons au mieux. Le soutien du Rased est important. Il faut les impliquer coûte que coûte. C'est usant, éprouvant pour les élèves comme pour nous.

Tout pareil. Même si on a l'impression que rien ne rentre ou que ce qui semblait enfin acquis, de haute lutte, a complètement disparu quelques jours plus tard, on se rend compte que les bénéfices existent bien.

Tout pareil aussi sur le sentiment d'épuisement et sur les souffrances infligées aux autres élèves de la classe du fait d'un ou deux "rigolos" qui, je pense, profitent bien de leur statut de gros paresseux d'enfant en difficulté pour ramener la couverture à eux et obtenir l'attention constante de la maîtresse sur leur petite personne.

Avec un petit bémol pour le Rased qui explique parfois un peu trop à certains que, finalement, ce n'est pas grave s'ils n'essaient pas de réussir en classe pourvu qu'ils se sentent bien.
Notre psychologue scolaire les croit sur parole lorsqu'ils disent que c'est "trop difficile" et qu'ils sont en grande souffrance devant leur incapacité à y arriver.
Et comme ça arrange aussi les parents qui préfèrent avoir un enfant handicapé plutôt que d'avoir à faire preuve de rigueur, nous sommes bien seuls pour combattre tout cela !

Merci de vos réponses. Quelle énergie ils demandent, ces deux ou trois loulous, tout de même... Pour un résultat tellement peu tangible.

Muf, en rangeant du bazar ce matin après le départ des collègues, je suis retombée sur le cahier de l'élève qui est partie de ma classe en décembre. Celle qui était totalement chtarbée.

En revoyant le cahier, je me suis rappelée l'énergie que j'avais déployée pour essayer de canaliser cette gamine et de lui apprendre à lire et à écrire. En ayant à peu près réussi côté lecture mais pas côté écriture, toute rééducatrice que je suis. Et je me souviens aussi de la marque durable laissée sur la classe, l'excitation qui a perduré même après son départ, le mode de fonctionnement de la classe entière marquée par cette gamine — et quelques autres, bien sûr, qui étaient bien en résonance avec elle.

Je n'ai rien à apporter au débat, si ce n'est que oui, cette impuissance est une vraie source de stress professionnel. On donne beaucoup, je pense sincèrement que c'est utile, qu'on aide, mais il ne faut pas oublier toutes les forces contraires auxquelles sont soumis les gamins et qui rament dans l'autre sens. Et puis, on n'est pas tout-puissants, loin de là.

Dans mon nouveau métier, c'est pareil, en fait.

Même constat que vous.
Stress, découragement, sentiment d'impuissance, culpabilité...

Ce qui est difficile dans ces cas là, c'est que souvent on est seul face aux difficultés de ces élèves.
Les parents nous trouvent trop exigeants. Les collègues sont résignés ou bien ils trouvent qu'on ne sait pas y faire, qu'on ne différencie pas comme il faudrait. Le RASED, quand il intervient, n'agit pas assez en coordination avec le travail de la classe. Mettant l'accent sur la confiance et l'estime de soi, il déplace le problème et encourage l'enfant dans ses résistances.

A ce sujet, je me demande bien combien de temps il se passera avant que l'instit de la nouvelle école nous appelle pour savoir comment était le Tom-Tom chez nous...

Des parents qui préfèreraient classer leur gamin en situation de handicap plutôt que de le faire descendre du trône où l'a conduit son "syndrome de toute-puissance" diagnostiqué par le pédopsy, c'était quand même la première fois que j'en rencontrais !

Akwabon DC a écrit:
Des parents qui préfèreraient classer leur gamin en situation de handicap plutôt que de le faire descendre du trône où l'a conduit son "syndrome de toute-puissance" diagnostiqué par le pédopsy, c'était quand même la première fois que j'en rencontrais !

Moi j'en ai vu d'autres,


Sinon effectivement, c'est une des choses que je trouve les plus fatigantes dans ce métier, même si quand ça marche on est un peu fiers   mais un peu seulement parce qu'on est souvent les seuls à le remarquer... :462: 
Mon grand-père instituteur (le mari de ma fameuse grand-mère institutrice) faisait de véritables épisodes dépressifs quand il n'y arrivait pas avec un gamin. C'est d'ailleurs pour ça qu'il ne prenait plus de CP, quand un élève n'apprenait pas à lire avant janvier, c'était le drame  :476: 

Que faire face à ces échec?

Je ne sais pas. On s'épuise pour certains enfants, seule en général, sous les critiques et les jugements types "si tu n'y arrives pas c'est que tu ne sais pas t'y prendre."
C'est une grande source de stress et de mal-être.

Ce qui me bouffe également, ce sont les troubles du comportement.
J'avais depuis deux ans un élève, pas méchant, mais qui envahissait la classe de ses bruits, bavardages, clowneries... Beaucoup d'énervement de part et d'autre.

Et quand je l'excluais (parfois pour des après-midi entiers, car je craquais nerveusement, ne sachant plus quoi dire ou faire pour qu'il arrête d'entraîner X ou Y dans ses drôleries), la classe n'était plus la même. Calme, presque studieuse.

Et je me disais : "Purée qu'est-ce qu'on aurait pu bosser et avancer sans lui...".

Cette année j'avais un cas de TdC lourd dans la classe (avec AVS, 2 demie journée en ITEP...) il a été changé de classe en février car je craquais, les élèves craquaient, les parents craquaient... la classe a changé du tout au tout à ce moment là.
Un seul élève plombe une classe entière, et on ne peut rien faire.