Un camarade de classe de mon fiston a été prof de maths en collège ce trimestre

Ce soir, fiston est passé à la maison garder un adorable bébé de ma connaissance pendant que je donnais mes cours. A un moment, il a été rejoint par un copain de sa promo d'ingénieur.

Ce jeune homme a eu pas mal de mal à trouver un premier emploi. Au mois de septembre, nécessité faisant loi, il a accepté un poste de prof de maths contractuel en collège en Seine-Saint-Denis... Le pauvre ! Il avait peur de ne pas avoir le niveau... en maths !

Il m'a dit candidement : "Vous savez, en fait, les profs de maths, les vrais, ils savent moins de trucs que moi en maths, mais par contre ils savent plein de choses que je ne sais pas... enseigner, par exemple !"

Il était touchant, le pauvre... Personne ne lui avait rien dit. "Je suis arrivé en pensant que c'était simple, j'avais des connaissances, j'allais les leur donner, ils allaient poser des questions s'ils ne comprenaient pas... comme à l'école d'ingénieur, quoi !"

Finalement, au bout d'un trimestre, il s'est fait virer. Ne convient pas pour le poste, n'a pas les qualités pédagogiques. Ne sait pas tenir sa classe. On se demande vaguement par quel miracle il pourrait savoir faire une chose pareille...

Bon, allez, tout est bien qui finit bien, il a finalement trouvé un autre emploi, un job normal, dans le privé. Il ne travaille pas comme ingénieur mais comme gestionnaire, mais dans un domaine proche du sien, et il espère se constituer une expérience suffisante pour évoluer ensuite. Il se plaint seulement de ce qu'on lui fait cocher bien trop de cases...

Et je suppose qu'on a tout fait pour lui simplifier la tâche, en plus... On a bien dû lui conseiller d'aborder le programme à travers des tâches complexes transdisciplinaires, de faire élaborer des machins-trucs avec des bulles et des flèches dont le nom m'échappe là, subitement, de se trimballer avec son application "valider le socle d'un coup de pouce sur l'écran" sur son smartphone...

Le pire dans tout ça c'est que je pense que de plus en plus de profs de maths ne peuvent plus enseigner dans certaines classes de certains collèges... ça me rend triste tout ça

Akwabon DC a écrit:Et je suppose qu'on a tout fait pour lui simplifier la tâche, en plus... On a bien dû lui conseiller d'aborder le programme à travers des tâches complexes transdisciplinaires, de faire élaborer des machins-trucs avec des bulles et des flèches dont le nom m'échappe là, subitement, de se trimballer avec son application "valider le socle d'un coup de pouce sur l'écran" sur son smartphone...

Non. D'après ce que j'ai compris, on lui a dit "Voilà votre emploi du temps, la 4D c'est en 322, la 6A en 211, etc." et c'est tout. Go, man, go. Tu as 23 ans et ton diplôme d'ingénieur en poche, tu peux enseigner !

On ne sait laquelle des deux formules est la pire... C'est fou ce que c'est pratique de ne plus considérer l'instruction comme indispensable ! Vous imaginez le fric que l'État va pouvoir ne pas engager à fonds perdus pour instruire des gamins qu'on a rendus inaptes à l'instruction ?

Tout ça va être incompatible avec l'objectif "une cellule par prisonnier", hein... la surpopulation carcérale a de beaux jours devant elle !

Aux Etats Unis, ils ont des entreprises privées qui fournissent des prisons aux Etats... Je ne sais pas en échange de quoi mais il paraît qu'elles sont contentes de le faire. C'est peut-être une solution.
"Fermez une école, vous ouvrirez une prison", c'est carrément innovant comme choix de société, non ?

Et moi j'ai un père d'élève qui est prof vacataire en ce moment. C'est un homme français qui vit en Australie, mais qui est revenu en France pour 2 ans. En Australie il enseigne le Français à des grands (peut-être lycée ou plus grand, je ne sais pas). Donc là il a été pris comme prof d'anglais au collège, jusque là tout va bien. En plus il est très grand, il en impose.
Et hier il m'expliquait que c'était dur, surtout avec une classe de 4ème SEGPA... Il me dit, je n'ai pas le diplôme français alors je ne sais pas trop comment m'y prendre. Certains élèves n'arrêtent même pas leur conversation quand je m'approche d'eux pour leur parler.

Moi, j'ai halluciné au niveau communication car le directeur de la segpa est un instit que je connais bien (qui a choisi ce poste pour le faible nombre d'heures de classe....) et il ne l'a rencontré que cette semaine, alors qu'il enseigne depuis septembre! Donc il s'en veut que certains élèves n'apprennent rien à son cours mais il ne savait pas que c'était surtout des instits qui géraient cette classe, et il n'avait pas eu l'occasion d'échanger avec eux!

J'ai un collègue et copain qui a réussi le CAPES de SVT et s'est retrouvé bombardé dans un collège REP, pas trop loin de chez lui, après un cycle 2 en RPI, seul dans sa petite école à la cime d'un village perché juste sous les assauts du mistral.
Il paraît qu'il s'en voit et qu'il est atterré particulièrement par le manque d'écoute lui aussi.
Du coup, je suis contente d'avoir axé mon bouquin sur la Maternelle sur la nécessité de fonder de véritables "groupes-classes" et d'apprendre aux enfants à écouter, observer, dialoguer à une vingtaine, sans ces foutus ateliers décloisonnés et ces individualisations des parcours qui viennent de bousiller toute une génération de gamins qui n'avaient rien demandé à personne !

Ma petite voisine, qui se destine à l'enseignement, est passée d'un excellent niveau en maths au collège à un niveau médiocre.
Renseignements pris par les parents inquiets, le prof de maths fait des cours magistraux, n'écrit rien, n'affiche rien et ne corrige rien... Un vrai théseu comme le reconnait le principal, qui a pris ce qui s'était présenté de mieux !

Oui, Meuhpet, tu as raison, on peut sûrement toujours trouver pire...

Je suis déçue, très déçue, Meuhpet ! Je pensais que les cours marginaux étaient une nouvelle pédagogie.
Et c'était juste un clavier Fisher Price. Bouh !

Tinsel a écrit:Et moi j'ai un père d'élève qui est prof vacataire en ce moment. C'est un homme français qui vit en Australie, mais qui est revenu en France pour 2 ans. En Australie il enseigne le Français à des grands (peut-être lycée ou plus grand, je ne sais pas). Donc là il a été pris comme prof d'anglais au collège, jusque là tout va bien. En plus il est très grand, il en impose.
Et hier il m'expliquait que c'était dur, surtout avec une classe de 4ème SEGPA... Il me dit, je n'ai pas le diplôme français alors je ne sais pas trop comment m'y prendre. Certains élèves n'arrêtent même pas leur conversation quand je m'approche d'eux pour leur parler.

Moi, j'ai halluciné au niveau communication car le directeur de la segpa est un instit que je connais bien (qui a choisi ce poste pour le faible nombre d'heures de classe....) et il ne l'a rencontré que cette semaine, alors qu'il enseigne depuis septembre! Donc il s'en veut que certains élèves n'apprennent rien à son cours mais il ne savait pas que c'était surtout des instits qui géraient cette classe, et il n'avait pas eu l'occasion d'échanger avec eux!

Heu... Il fait toujours plus d'heures qu'un certifié, et sans les ISO... Et faut voir les gamins qu'on leur envoie.
J'ai une grande admiration pour les collègues de SEGPA, méprisés par les PLC. Je ne pense pas que "le fable nombre d'heures de classe" soit un argument qui me fasse embrasser la voie.

Je ne me sentirais pas capable d'un poste en segpa non plus! Je ne dis pas que ce collègue a choisi la planque!!! Mais il a choisi sa planque à lui. Il fait parti de ces jeunes qui cherchent un métier avec beaucoup de vacances, donc il se dirigeait vers prof d'EPS mais très peu de place à cette époque donc instit. Et en tant qu'instit il a toujours préféré des postes en spécialisé car, et là je te parle bien de son point de vue à lui, il ne préparait pas sa classe car de toute façon tout pouvait arriver, et il visait la segpa car il y a moins d'heure qu'en école primaire.
Je constate aujourd'hui qu'il a laissé un prof vacataire gérer une des 4 classes de segpa sans lui adresser la parole pendant 3 mois 1/2...

C'est triste.
(j'ai une copine qui avait choisi SEGPA itou pour le moins d'heures et 2 ou 3 matières maxi)

Eh bien, tout ça n'est pas bien gai. Moi, je connais même une mère de famille recrutée comme instit en banlieue en disant que pour commencer, elle ne voulait pas de poste en ZEP, histoire d'arriver à quelque chose sans formation…

Oui, oui, madame et on la balance dans une école où l'instit de CM2 se faisait taper par ses élèves. Bonjour l'ambiance ! Bizarrement, elle n'a tenu qu'une semaine !!!

Dans les bureaux, ils ont du mal à admettre qu'on ne nait pas enseignant et que tenir une classe ça s'apprend et pas seulement sur le tas !

Mère de famille, c'est pas mal, comme qualification, pour enseigner, aussi.

Déjà que quand j'ai commencé dans l'enseignement, plein de gens m'ont dit "Ah oui, tu as trois enfants, tu peux être instit d'office, sans passer le concours" ! Ca m'exaspérait, à l'époque, qu'on puisse penser qu'une chose aussi absurde soit vraisemblable... maintenant, sans doute, ça va devenir vrai...

(et je tiens à préciser que j'ai passé le concours avec toutes les conditions de diplômes requises et avant la naissance de mon troisième enfant, nanmého !)